Cercle Thieulâm

Écoles d’arts martiaux chinois traditionnels
法國少林聯合會

LA LÉGENDE DE BODHIDHARMA

Volet 1 (Ier siècle après J-C.)

Vers l’an 60 de notre ère, le bouddhisme pénétra la Chine par le biais de missionnaires Indiens.
A la fin du Vème siècle, l’un d’entre eux, Batuo (missionnaire du Hinayana (1)), s’attira les bonnes grâces de l’empereur Xiaowen. En 495, celui-ci dans un élan de générosité fit construire un temple dans la province du Hénan, prés de Kaifeng. SHAOLIN était né !

Le temple existait. Il ne lui manquait plus que la légende qui allait se construire autour du ” Père de tous les arts martiaux “.

La légende de Bodhidharma : l’illuminé

Bodhidharma revêts plusieurs appellations : Da Mo, Ta Mo, Pu Ti Ta Mo, Pu Tu Duao Luo, Daruma Taishi (japonais)
 

Cela faisait de nombreux mois que le vieil homme suivait la piste qui conduisait du ” berceau de la civilisation ” (l’Inde) à la contrée barbare qu’était la Chine.
Avec ses 60 ans, c’était un exploit qu’il put franchir les massifs de l’Himalaya, traverser le plateau Tibétain et la Chine intérieure, pour arriver à Chin Ling, la capitale de la dynastie Liang.

Mais notre homme que l’on appelait Da Mo n’était pas n’importe qui. Moine indien, troisième fils du grand roi Sugandha de la province de Madras, membre de la caste des guerriers, c’était un robuste gaillard rompu aux techniques de combat de l’Inde ancestrale. Il fut initié au Bouddhisme par le grand Prajnatara, un maitre du Mahayana (3) et 28ème patriarche après le Bouddha.

Au fur et à mesure que notre homme pénétrait la Chine, il put voir la forte influence que le Bouddhisme exerçait sur le pays. Mais la préférence des rites à la réelle compréhension du message Bouddhique l’irrita, et ce fut d’un air sévère qu’il arriva à la cour de l’empereur Wu. Son renom de Prince le précédant, il fut reçu facilement par l’empereur, mais l’entrevue s’avéra orageuse.
Da Mo critiqua violement tout ce qu’il considérait comme des actes de “bonne conscience “. L’empereur rétorqua :

J’ai diffusé les textes sacrés, créé des temples, multiplié les moines, protégé la loi… Ces actes ne méritent-ils pas quelque considération?”

Rien de cela n’est méritoire !” répondit Da Mo
Dis moi alors où se trouve la voie ? ” interrogea l’empereur .
“La voie habite toute chose, rien n’est sacré !”
affirma Da mo
Qui est tu alors ?” demanda l’empereur en perdant patience.
Je n’en sais rien moi même… “ termina notre missionnaire. 

Il n’eut la vie sauve que grâce au prestige qui entourait le rang de Prince et de Prêtre. Connaissant la susceptibilité des empereurs Chinois, le fait qu’il put partir sain et sauf de la ville tient du miracle.

Ainsi désavoué, Da Mo partit vers le sud. Il arriva un matin sur la rive du Changjiang (Yang Tsé Kiang) en crue. Pour traverser le fleuve immensément large, il coupa un roseau à 5 feuilles et en marchant sur la tranche, réussit à franchir le puissant cours d’eau. Il faut savoir qu’à cette époque en période de crue, même avec un bateau, il était dangereux de traverser le fleuve. De ce miracle , les descendants de Da mo retinrent le nombre de 5 comme symbole de son enseignement.
Finalement, notre voyageur demanda asile aux TaoJen (moines) du monastère de Shaolin. Mais très vite, il se heurta à leur conception de l’Hinayana. Il se retira alors à l’extérieur du monastère, à un kilomètre au Nord, près du sommet des ” cinq mamelons”, au fond d’une petite grotte.

La méditation de Bodhidharma

Il s’assit face à la paroi, et entra dans une méditation profonde qui allait durer 9 ans, sans manger, ni boire, ni dormir. Il perdit complètement l’usage de ses mains et de ses pieds.

Un jour, il eut un instant de faiblesse et s’endormit… Il se réveilla furieux et, pour éviter que l’incident ne se reproduise, il se coupa les paupières et les jeta à terre. Ces paupières donnèrent naissance au premier arbre à Thé.
Dans sa méditation, il réussit à entrer en communication avec le monde qui l’entourait, il comprenait et dialoguait avec les arbres, les insectes, les rochers et les animaux.

Mais le vieil hermite en méditation avait éveillé la curiosité et l’admiration des moines du monastère. L’un d’entre eux, HUI HE se présenta à Da Mo et resta une semaine entière immobile dans la neige à l’entrée de la grotte. Le vieillard ne semblait pas le voir. Hui He supplia le maître de tenir compte de sa présence, et enfin, un matin :

Je ne bougerai pas tant que la neige ne sera rouge !” déclara Damo qui voulait ainsi être tranquille .

Mais Hui He le prit au mot, se coupa le bras gauche, inondant la neige de son sang et porta son bras au maître. Ému, celui ci se retourna et écouta.

Maître, mon esprit est agité, puis je te prier de lui apporter la paix ?” interrogea Hui He

Montre cet esprit tant perturbé fais le sortir et je lui donnerai la paix !”

Mais seigneur, il m’est impossible de te montrer mon esprit !”

Tu vois bien , je t’ai déjà apaisé !” finit Damo avant de retourner à sa méditation…..

Par la suite, il donna son bol et son baton à Hui He en en faisant son successeur. Damo atteint le nirvana (l’illumination) et sortit finalement de sa longue méditation. Il redonna vie progressivement à son corps mortifié par les années grâce à des exercices qu’il avait découvert au cours de sa méditation .

Il rentra au monastère, et fût reçu cette fois comme un saint, les moines l’appelèrent Bodhidarma (l’illuminé).
Il s’aperçut que la plupart d’entre eux étaient malades et fragiles, à cause de leur vie monastique. Aussi il leur enseigna en même temps sa philosophie, qui allait s’appeller Ch’an (Zen en Japonais) ainsi que des techniques pour redonner vie à leur corps .

Les Arts Martiaux de Shaolin étaient nés. En effet tous les mouvements qu’il enseigna étaient des techniques martiales dont le but était l’efficacité au combat et le renforcement du corps. D’après la légende, Bodhidharma mourut à Shaolin et une tombe accueillit sa dépouille. Cela dit, quelques mois plus tard un officier de l’empereur crut voir le saint homme dans le Turkestan. Il portait son baton et une seule sandale aux pieds. L’empereur fit ouvrir sa tombe où l’on ne retrouva que la deuxième sandale .

Bodhidharma traversa la Chine comme un mirage, mais ce qu’il nous a laissé était bien réel .

Les Arts Martiaux de Shaolin venaient d’entrer dans l’histoire !

(1) Hinayana : courant bouddhique du petit véhicule . Il est le plus vieux et s’adresse à une élite intellectuelle
(2) Shaolin ( Siulam) : signifie petite ou jeune forêt . Thieulâm en Viêtnamien
(3) Mahayana courant: bouddhique du grand véhicule . il veut amener le plus grand nombre à l’illumination .